Le point sur les marchés financiers mars 2023

Vendredi 24 mars 2023

Les marchés financiers ont été soumis à de fortes tensions ces derniers jours en raisons de difficultés rencontrées par plusieurs établissements bancaires aux Etats-Unis, puis en Europe avec Credit Suisse, faisant craindre un temps, malgré la spécificité de chaque situation, un risque de contagion à l’ensemble du système financier. L’intervention des régulateurs a permis d’apaiser progressivement les tensions et aux marchés de corriger une partie des effets des baisses enregistrées.

 

RETOUR SUR LES PRINCIPALES CLASSES D’ACTIFS

Banques Centrales :

Les Banques Centrales ont malgré ce contexte conservé leur cap en poursuivant leur remontée de taux. Ainsi, le 16 mars dernier, la BCE a annoncé une hausse de 0,50% de ses 3 taux directeurs, afin de poursuivre la lutte contre l’inflation encore très élevée en zone euro (8,5% pour le glissement annuel de février). Le taux de rémunération des dépôts atteint dorénavant 3%, un niveau qui n’avait pas été observé depuis 15 ans. L’institution a toutefois souligné l’ampleur des incertitudes actuelles, la poussant à se montrer prudente concernant ses futures actions, afin de se donner le temps d’évaluer les risques sur le système financier européen. Elle a, par ailleurs, tenu à tenter de rassurer les marchés quant à la robustesse du système bancaire européen, tout en rappelant qu’en cas de besoin, la BCE disposait de tous les outils nécessaires pour répondre à une crise de liquidité.

De même, la Réserve Fédérale américaine a relevé ses taux d’un quart de point, comme cela était attendu, portant ainsi les taux des Fed Funds à 4,75%-5%, qui retrouvent aujourd’hui des plus hauts depuis 2007. La décision d’augmenter ses taux, malgré le tumulte bancaire a permis à la Fed de maintenir sa crédibilité dans la lutte contre inflation et de mettre en avant des instruments plus adaptés pour apporter la liquidité aux banques et restaurer la confiance.

Ces deux banques centrales ont également souligné le degré supplémentaire de durcissement des conditions de financement, lié à la crise bancaire actuelle, qui pourrait résulter dans des conditions de crédit plus strictes pour les ménages et les entreprises et peser sur l'activité économique, l'embauche et l'inflation. Dès lors, la BCE et la FED auraient moins besoin d'agir par la politique monétaire si l'inflation venait à ralentir par un choc de demande.

Taux :

Au début du mois de mars les taux souverains allemands à 10 ans ont fortement progressé atteignant 2,75%, un plus haut depuis 2011. Mais, la crise bancaire sur le territoire américain, et par extension en Europe, a largement modifié les attentes relatives à l’ampleur du resserrement monétaire additionnel à venir, engendrant de plus en plus de volatilité sur les marchés obligataires. Un tel contexte a provoqué un net recul des rendements obligataires qui ont retrouvé dans cet environnement d’aversion au risque leur traditionnel rôle de valeur refuge, le taux de l’emprunt d’Etat allemand à 10 ans s’inscrit dès lors en deçà de 2,20%. Outre Atlantique les obligations souveraines américaines ont suivi le même parcours, en dépassant le niveau de 4% début mars pour revenir à 3,45% après l’annonce de la FED du 22/03. Le marché du crédit (obligations d’émetteurs privés) a également subi une très forte volatilité enregistrant une brusque hausse des spreads (supplément de rendement offert pour le financement de ces émetteurs) lié à l’aversion au risque. L’annonce que les porteurs de dette Crédit Suisse dite « AT1 » (quasi fonds propres) subiront la totalité des pertes a en effet lourdement pesé sur l’ensemble de la classe d’actif. Depuis les propos rassurants des autorités européenne et américaine ont provoqué une légère détente de ces spreads de crédit.

 

Actions :

Sur les marchés d’actions, après un début de mois de mars en demi-teinte, marqué toutefois par une surperformance en Europe de certains secteurs cycliques comme l'automobile, l'industrie et la construction, l’intervention des autorités bancaires aux Etats-Unis, puis le rachat de Crédit Suisse par UBS n’ont pas empêché un regain de volatilité.

Ainsi, en moins de 10 jours, les actions de la Zone Euro perdaient jusqu’à -5,14% (indice Euro Stoxx 50 du 9 au 17 mars 2023), tirées vers les bas par les valeurs bancaires (près de -16% sur la même période). Les actions américaines résistaient beaucoup mieux (indice S&P 500 quasi à l’équilibre), tirées quant à elles vers le haut par les valeurs de la technologie, l’indice Nasdaq 100 gagnant +4,38% aidé par la baisse des taux souverains aux Etats-Unis.

Soulignons toutefois que depuis le début de semaine, la volatilité des marché d’actions a nettement baissé, l’indice Euro Stoxx 50 a largement rebondi (+3,56%) et affiche une performance de 11,23%* depuis le début de l’année. Notons que si les valeurs bancaires de la zone euro restent sous pressions, elles affichent tout de même une performance positive de 4,92% depuis le début de l’année.

Sur le plan sectoriel, depuis le début de l’année, les secteurs de la consommation discrétionnaire et de la technologie connaissent de fortes surperformances. A l’inverse les secteurs de l’énergie et de la finance affichent désormais un fort retrait en relatif.

Au vu du contexte actuel, nous conserverons un positionnement prudent avec une sous-exposition globale sur les actions. Une exposition géographique sous-pondérée en actions de la zone euro et des Etats-Unis. Nous conservons une surpondération sur les marchés d’actions émergentes qui voient une meilleure perspective de croissance des bénéfices, portées en particulier par la dynamique de réouverture en Chine. Nous conservons également des biais sectoriels sur les services à la collectivité, les télécoms et la technologie, ainsi qu'une thématique de transition énergétique.

Les points clés à retenir

  • Difficultés du Credit Suisse : les régulateurs suisses ont organisé le rachat de Credit Suisse par UBS au cours du week-end dernier afin de limiter la propagation de la crise de Credit Suisse. L'accord entre UBS et Credit Suisse permet d'éliminer les risques de contrepartie et de contagion. Cependant, la dépréciation complète des obligations dites AT1 (« Additional Tier 1 ») a surpris les investisseurs et a eu un impact négatif sur le marché du crédit subordonné bancaire. Les autres régulateurs européens (Autorité bancaire européenne, Conseil de résolution unique, Banque centrale européenne, Banque d’Angleterre) ont déjà confirmé leur approche en matière de résolution et le fait que les instruments de capitaux propres doivent absorber les pertes avant toute dépréciation des obligations AT1. Cela devrait rassurer les investisseurs sur le cadre réglementaire européen et soutenir le marché.

 

  • Situation du secteur bancaire européen : nous pensons que le système bancaire européen est solide et que la réévaluation actuelle des prix créera des opportunités de crédit attrayantes pour les banques de détail les plus stables et les plus qualitatives. En ce qui concerne les actions, l'expansion des marges d'intérêt nettes sera moins importante que prévu et les volumes seront plus faibles en raison du resserrement des conditions de crédit. La croissance des bénéfices des banques européennes restera donc positive, mais moins que prévu. Les inquiétudes concernant les crises du crédit semblent excessives compte tenu de la solidité du profil de liquidité et de la position en capital des banques européennes.

 

  • Perspectives économiques mondiales et banques centrales : l'atterrissage de l'économie pourrait être plus difficile qu'initialement prévu. Nous constatons déjà une détérioration tangible de l'économie américaine, qui devrait entrer en récession au deuxième trimestre. Le resserrement du crédit qui commence à se matérialiser aura un impact sur la croissance et déterminera l'ampleur de la récession. Dans un contexte de perspectives économiques plus faibles, le marché réévalue l'action des banques centrales. Cette semaine, la Fed a relevé ses taux de 25 points de base. Il est possible que nous ayons encore une hausse de 25 points de base d'ici la fin de l'année, mais cela supposerait qu'il n'y ait pas d'autres problèmes dans le secteur bancaire, que les mesures de liquidité de la Fed permettent une stabilisation du secteur bancaire, que l'offre de crédit diminue et que l'inflation soit persistante. Nous entrons donc en terrain inconnu et nous nous attendons à ce que les banques centrales conservent une approche encore plus dépendante des données, avec peu ou pas d'orientation stratégique, comme ce qui s’est passé lors de la récente réunion de la BCE.

 

Perspectives d’investissements

Nous restons prudents en termes d'allocation d’actifs, en particulier dans les secteurs du marché sensibles aux perspectives économiques, tels que les actions ou les obligations « haut rendement ». En revanche, nous sommes plus favorables aux obligations d’Etat américaines, qui jouent de nouveau un rôle d’actif de diversification dans les phases de turbulences. Nous sommes également positifs vis-à-vis de l'or, en raison de son attrait en tant que valeur refuge en période d’aversion au risque. En ce qui concerne le pétrole, nous adoptons une position neutre, après avoir été favorables à ce dernier pendant un certain temps. En effet, les conséquences négatives d'un affaiblissement de la demande aux États-Unis et en Europe dans un scénario de resserrement du crédit l'emportent selon nous sur l'impact positif de la réouverture de l’économie chinoise.

 

Zoom : L'accord entre UBS et Credit Suisse, quel impact à long terme ?

Credit Suisse était le maillon faible du secteur bancaire européen, compte tenu de ses problèmes particuliers de viabilité et de rentabilité (problèmes de gouvernance, banque d'investissement en difficulté et manque de diversification des clients), de sorte qu'une fusion avec UBS devrait rétablir la confiance dans les banques européennes.

Même si, à notre avis, une résolution non coordonnée aurait été gérable (étant donné que les expositions à Credit Suisse étaient diversifiées dans plusieurs secteurs), l'accord élimine jusqu'à présent les risques de contrepartie et de contagion. Il est également de bon augure de voir une solution du secteur privé à ce problème, sans qu'il soit nécessaire de recourir à un renflouement par le gouvernement de grande ampleur (contrairement à la crise financière de 2008 où le soutien de l'État a joué un rôle important).

Si la fusion peut s'avérer une opération stratégique attrayante à long terme pour UBS, puisque le groupe devrait accroître sa part de marché dans la gestion de fortune et les services bancaires suisses, l'intégration devrait être complexe et mobiliser l'attention de la direction au cours des prochaines années. Il est également surprenant que les actionnaires d'UBS n'aient pas eu le droit d'approuver une transaction d'une telle ampleur, même si le temps semblait être un facteur essentiel compte tenu des pressions sur les liquidités auxquelles était confronté Credit Suisse et des risques plus larges pour la stabilité financière si une solution rapide n'était pas trouvée. Dans l'ensemble, nous pensons que les problèmes de Credit Suisse étaient idiosyncrasiques, et nous ne pensons donc pas que cela puisse déclencher une nouvelle consolidation dans le secteur bancaire.

Définitions :

  • AT1 : les instruments de fonds propres additionnels de catégorie 1 sont continus/perpétuels, en ce sens qu'ils n'ont pas d'échéance fixe, y compris les actions privilégiées et les titres convertibles à haut degré de contingence. Les titres convertibles contingents (souvent appelés CoCos) sont une composante majeure de l'AT1 et leur structure est façonnée par leur objectif principal, à savoir une source de capital facilement disponible pour une entreprise en temps de crise.
  • Points de base (pb) : un point de base est une unité de mesure égale à un centième de point de pourcentage (0,01 %).
  • Credit Default Swap (CDS) : un Credit Default Swap (CDS) est un accord de swap financier selon lequel le vendeur du CDS dédommagera l'acheteur en cas de défaillance d'un prêt ou d'un autre événement de crédit.
  • Spread de crédit : il s'agit de l'écart entre le rendement d'une obligation d’entreprise et le rendement du Trésor. L'écart ajusté en fonction des options est une mesure de l'écart ajusté pour tenir compte d'éventuelles options intégrées.
  • Secteurs cycliques et secteurs défensifs : les entreprises cycliques sont des entreprises dont les bénéfices et le cours des actions sont fortement corrélés aux fluctuations économiques. Les actions défensives sont moins corrélées aux cycles économiques. Les secteurs cycliques sont la consommation discrétionnaire, la finance, l'immobilier, l'industrie, les technologies de l'information et les matériaux, tandis que les secteurs défensifs sont la consommation de base, l'énergie, les soins de santé, les services de télécommunications et les services publics.
  • Bénéfice par action (BPA) : il s'agit du bénéfice d'une entreprise divisé par le nombre d'actions ordinaires en circulation. Le résultat obtenu est un indicateur de la rentabilité de l'entreprise.
  • Spread ajusté à l'option : il s'agit de la mesure de l'écart entre le taux d'un titre à revenu fixe et le taux de rendement sans risque, qui est ajusté pour tenir compte d'une option incorporée.
  • Duration : la duration est une mesure de la sensibilité du prix (la valeur du capital) d'un investissement à revenu fixe à une variation des taux d'intérêt, exprimée en nombre d'années.
  • Ratio cours/bénéfice (ratio PE) : ratio d'évaluation d'une entreprise qui mesure le prix actuel de son action par rapport à son bénéfice par action (BPA).
  • Investissement de qualité : vise à capturer les performances des actions de croissance de qualité en identifiant les actions ayant un rendement élevé des capitaux propres, une croissance stable des bénéfices d'une année sur l'autre et un faible effet de levier financier.
  • Spread : différence entre deux prix ou deux taux d'intérêt.
  • Taux terminal : le taux terminal est défini comme le point culminant où le taux d'intérêt de référence - le taux des fonds fédéraux - s'arrêtera avant que la banque centrale ne commence à le réduire.
  • Volatilité : mesure statistique de la dispersion des rendements d'un titre ou d'un indice de marché donné. En général, plus la volatilité est élevée, plus le titre ou le marché est risqué.

 
 

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