Informations financières

La lettre mensuelle de gestion

L’économie mondiale évolue dans l’incertitude de la guerre commerciale initiée par les Etats-Unis. Les indicateurs avancés montrent que les perspectives se sont légèrement améliorées, mais il est encore trop tôt pour mesurer l’impact réel des droits de douanes américains sur l’inflation et la consommation. L’Europe reste sur un rythme de faible croissance tandis que  la Chine tente de relancer la demande intérieure en assouplissant les conditions monétaires.

 

Quelles perspectives pour les marchés ?

Zone Euro

 

La zone euro reste sur un rythme de faible expansion avec une croissance du PIB de +1,2 % en variation annuelle au 1er trimestre, légèrement en dessous des attentes, et une tendance à +0,8 % sur l’année 2025. On note une accélération en Allemagne (+0,2 % vs. -0,2 % au T4 2024), mais également en France et en Italie. Cependant, les dernières données macroéconomiques de la zone euro indiquent un ralentissement au 2e trimestre. L'indice PMI composite1 de la zone euro a baissé à 50,2 en mai, se maintenant dans la zone d'expansion, bien que la faiblesse de la demande ait pesé sur l'indice. Les données indiquent une croissance molle au 2trimestre, en raison de l'incertitude liée au commerce. Les difficiles négociations commerciales entre la Maison Blanche et la Commission Européenne jouent défavorablement sur les perspectives. La confiance des consommateurs s’est nettement détériorée fin mai. Avec un taux d’épargne des ménages supérieur à 20 %, l'Allemagne devient le premier créancier mondial, détrônant ainsi le Japon.

L’indice des prix à la consommation de la zone euro a progressé de +2,2% tandis que la partie cœur ressort à 2,70 % en avril, légèrement au-dessus des prévisions. Constatant la faiblesse de l’économie et la proximité de sa cible d’inflation, la Banque Centrale Européenne (BCE) a poursuivi ses baisses de taux. La baisse des taux de la BCE soutient l’économie alors que les plans d’investissement public (Allemagne) améliorent les perspectives de croissance.

 

Etats-Unis

 

Malgré la forte incertitude sur la politique commerciale, l’économie américaine s’est montrée résiliente avec une amélioration étonnante des anticipations à la fin du mois. Néanmoins, des signes de faiblesse sont apparus. L'indice ISM manufacturier2 a baissé de manière inattendue à 48,5 en mai, son niveau le plus bas depuis six mois, marquant le 3e mois consécutif de contraction du secteur manufacturier, ce qui souligne l'incertitude croissante et les pressions sur les coûts, dues aux revirements des politiques commerciales américaines. L'indice ISM des services est également passé en zone de contraction, diminuant à 49,9 en mai, en raison de l’intensification des pressions sur les prix qui ont atteint leur niveau le plus élevé depuis novembre 2022. Les répondants ont indiqué des difficultés de planification en raison de l'incertitude des droits de douane. Le  PIB du 1er trimestre s’est contracté  de -0,2 % en rythme annualisé, une première depuis 3 ans.  La croissance des dépenses de consommation a été faible, tandis que les investissements fixes ont progressé à un rythme soutenu. Ces chiffres montrent que la demande intérieure privée reste ferme et les marges des sociétés stables. La progression des revenus des ménages permet une avancée de la consommation et une remontée du taux d’épargne. Le moral des ménages (Conference Board) porté par la stabilité du marché de l’emploi s’est amélioré. En effet, le marché du travail reste stable avec un taux de chômage à 4,2 % et des créations d’emplois montrant que l’incertitude générée par Donald Trump n’a pour l’instant pas modifié les anticipations des entreprises.

L'inflation américaine continue de baisser. L’indice des prix à la consommation est ressorti à 2,3 % en avril, en glissement annuel, marquant ainsi son troisième ralentissement consécutif cette année. Rien n'indique clairement que les droits de douane aient eu un impact significatif, mais il pourrait se faire sentir dans les prochains mois. L'anticipation des importations (les importateurs achetant des marchandises avant l'entrée en vigueur des droits de douane) ainsi que les retards et les exemptions accordés pourraient également retarder l'impact final de ces droits à l'importation sur les prix. L'indice des prix de la consommation personnelle (PCE) a progressé de 2,1 % en avril en rythme annuel (contre  2,3 % en mars). La désinflation se confirme avec des variations de prix PCE « cœur » a 2,5 % la mesure préférée de la Réserve Fédérale (Fed).

 

Chine

 

La guerre commerciale des Etats-Unis affecte les perspectives économiques dans les principaux marchés asiatiques, particulièrement en Chine. L'indice PMI manufacturier est passé de 50,5 à 49 en avril, signalant une légère contraction de l'économie dès le deuxième trimestre. Les droits de douane exorbitants imposés par les États-Unis, entrés en vigueur le 9 avril, pèsent sur les exportations chinoises, avec un indice des commandes à l'exportation à son plus bas niveau depuis la réouverture de la Chine post-Covid, début 2023. Les exportations vers le reste de l’Asie ont, en revanche, fortement progressé.  Le taux de chômage officiel reste stable à 5,1 % et les ventes de détail ont été publiées en hausse de 5 %. Cependant, la déflation se poursuit avec des prix à la production en baisse de 2,7 % en variation annuelle. La Chine a donc repris ses mesures d’assouplissement monétaire afin de stimuler l'activité économique dans ce contexte d'incertitude commerciale.

 

RETOUR SUR LES PRINCIPALES CLASSES D’ACTIFS

Politique monétaire des Banques Centrales

Lors d’un discours à Berlin, Christine Lagarde a mentionné que les politiques erratiques de Donald Trump offraient une « occasion unique » de renforcer le rôle international de l'euro et de favoriser l'émission supplémentaire de dette commune au niveau de l'Union Européenne.

Le 5 juin dernier, la Banque Centrale Européenne a, comme attendu, abaissé ses taux directeurs de -0,25 %, portant ainsi à 2 % le taux de rémunération des dépôts. Les prévisions de croissance du PIB ont été revues à la baisse (0,3 % en 2025, 0,2 % en 2026), et les projections d'inflation pour 2026 ont été réduites, tandis que celles de 2027 restent inchangées. 

Christine Lagarde a indiqué que la politique monétaire était désormais « en bonne position » pour faire face aux incertitudes à venir. Elle a précisé qu’avec cette baisse de taux, la BCE est « proche de terminer un cycle de gestion de chocs : Covid-19, Ukraine, inflation… ». Elle a expliqué qu’il fallait désormais évaluer encore et encore les mesures qui ont été prises et les développements économiques. Ainsi, l’hypothèse d’une pause dans l’assouplissement monétaire s’est renforcée et a eu pour effet un ajustement des attentes quant à la prochaine baisse de taux (anticipée en décembre désormais), ce qui s’est traduit à court terme par un rebond des taux souverains européens et de l’euro face aux principales devises.

La Réserve Fédérale américaine conserve une position prudente dans l’attente de connaître l’issue des négociations commerciales et de pouvoir appréhender l’état de la croissance de l’économie réelle. Le dernier rapport sur l’emploi américain ne montre pas suffisamment de dégradation du marché du travail pour que les membres du FOMC3 interviennent, mais il en montre assez pour qu’ils restent sur leurs gardes. Les taux directeurs n’ont pas évolué depuis le début de l’année et demeurent dans une fourchette de 4,25 % - 4,50 %, soit un niveau encore restrictif. Les anticipations de marché tablent sur une réduction de -0,50 %, soit 2 baisses des taux Fed Funds à horizon fin d’année.

 

Marchés obligataires

Le rendement des obligations souveraines s’est stabilisé depuis un mois, faisant preuve d’une moindre volatilité qu’auparavant. La trêve dans les discussions sur les droits de douane a en effet globalement apaisé le marché, même si certaines annonces ont provoqué quelques inquiétudes. Ainsi, le 19 mai, après S&P en 2011 et Fitch en 2023, l’agence de notation Moody’s a décidé de retirer aux Etats-Unis le fameux AAA, l’accroissement de la dette américaine étant jugé inquiétant. Le rendement du T notes 10 ans a alors enregistré un pic à 4,60 % avant de se détendre en lien avec les déceptions macroéconomiques, pour s’inscrire dorénavant autour de 4,45 % (ce qui correspond au niveau moyen enregistré cette année).

En zone euro, le Bund à 10 ans (taux souverain allemand) s’affiche à 2,55 % et reste également très proche de sa moyenne observée cette année. L’agence S&P a maintenu la note souveraine de la France à AA-, mais avec une perspective négative, indiquant qu'une dégradation pourrait être envisagée si la situation ne s'améliorait pas. Cette décision a toutefois soulagé les investisseurs qui craignaient déjà la dégradation, et a permis à l’écart des rendements souverains à 10 ans français et allemands de baisser et de retrouver un point bas à +0,65 %. La tendance la plus nette a été celle de emprunts d’État japonais, dont les taux continuent de monter pour atteindre des niveaux historiques. Les taux JGBs à 10 ans sont passés au-dessus de 1,5 %, du jamais vu depuis 2009.
Sur le marché du crédit (obligations d’émetteurs privés) le volume s’est renforcé avec une concentration d’émissions sur le marché primaire en euros, catégorie Investment Grade (de bonne notation > ou = à BBB-). En effet, en seulement 2 semaines (5-20 mai) 25 % des volumes enregistrés depuis le 1er janvier ont été émis. Juin débute également de façon dynamique avec déjà plus de 25 milliards d’euros déjà émis. L’offre abondante continue d’être facilement absorbée permettant ainsi une réduction des écarts de crédit et donc une solide  performance récente de cette classe d’actifs.

 

Notre gestion :

Nous maintenons une certaine prudence dans notre gestion en lien avec le contexte d’incertitude notamment sur le niveau des droits de douane qui sera finalement appliqué. Nos portefeuilles affichent une sensibilité aux taux d’intérêt supérieure à leur indice de référence. D’un point de vue géographique nous avons maintenu notre surpondération sur l’Italie, l’Espagne et le Portugal au détriment de la France dont l’incertitude politique et budgétaire n’est pas levée à moyen terme. Cependant nous restons flexibles dans notre positionnement sur la duration, afin de tirer parti de la volatilité des marchés qui permet des prises de positions plus court terme. Sur le segment du crédit nous avons soldé notre surexposition pour profiter de la bonne performance récente des obligations privées. Il nous semble aujourd’hui plus intéressant d’être surexposés aux obligations souveraines qui offrent un potentiel d’appréciation supérieur du fait des baisses de taux anticipés.

 

Marchés actions

Depuis un mois, les marchés actions ont fortement rebondi pour s’établir à des niveaux proches des plus hauts de l’année.

Les investisseurs ont salué la désescalade sur le front de la guerre commerciale et notamment l’accord sino-américain permettant de suspendre pendant 90 jours une partie des droits de douane punitifs instaurés ces dernières semaines.

Les anticipations sur la croissance économique ont logiquement été réévaluées à la hausse dans le sillage de cette nouvelle. La résilience des indicateurs économiques, ainsi qu’une solide saison de publications des résultats d’entreprises pour le premier trimestre, ont aussi permis de rassurer sur l’absence de ralentissement brutal et profond de l'économie américaine. L’incertitude reste toutefois très élevée. Le Président Trump n’a, une nouvelle fois, pas manqué l’occasion de créer l’inquiétude. Outre la décision d’un doublement des droits de douane sur l’acier et l’aluminium de 25 % à 50 %, il a menacé l’Europe de droits de douane à 50 % dès le mois de juin, avant de finalement revenir à la date du 9 juillet. En fin de mois, l’administration américaine a fait face à son premier revers juridique sévère concernant les questions commerciales. Les droits de douane ont été suspendus quelques heures par le Tribunal du commerce international américain après que celui-ci a mis en avant l’illégalité de la voie empruntée par Donald Trump, avec l’utilisation d’une loi d’état d’urgence de 1977, pour faire voter ses droits de douane réciproques. La décision du Tribunal a depuis été suspendue par la cour d’appel pendant que cette dernière analyse les fondements juridiques de cette décision, ce qui maintient les droits de douane en place et renforce l’incertitude des entreprises sur la manière dont elles doivent s’adapter. A ce stade, la guerre commerciale continue et il est très probable qu’en cas de nouveau revers, l’administration de Donald Trump trouve d’autres moyens pour les mettre en application (un renvoi à la Cour Suprême a d’ailleurs déjà été évoqué). 

L’autre sujet majeur a été le projet de loi fiscale et ses implications pour la croissance, les déficits et les taux d'intérêt. La Chambre des représentants est parvenue à voter la loi budgétaire. Cette dernière comprend notamment la prolongation d'une large partie de la réforme fiscale de 2017, ainsi que de nouvelles exonérations d'impôts (heures supplémentaires, pourboires) en échange de coupes dans les dépenses (suspension des subventions « vertes », moindre facilité d'accès au programme Medicaid). En revanche, le texte budgétaire n'inclut pas de nouvel abaissement de l'impôt pour les sociétés. Même si la légalité d’un tel dispositif est questionnée, la disposition fiscale 899 incluse dans le grand plan fiscal de Donald Trump (One Big Beautiful Bill) a jeté le trouble. Elle permettrait d’augmenter les taux d’impôt pour les individus et entreprises venant de pays appliquant une taxe “discriminatoire” sur les sociétés américaines (sont notamment visés les pays ayant une taxe sur les services numériques). Les revenus passifs issus d’investissements aux Etats-Unis (dividendes, intérêts…) seraient taxés, de même que les bénéfices réalisés aux Etats-Unis par des entreprises étrangères. La prochaine étape politique reste désormais l'adoption de la loi par le Sénat ces prochaines semaines. 

La saison de résultats des entreprises pour le premier trimestre 2025 s’est poursuivie et touche à sa fin. La croissance des bénéfices par action en glissement annuel au premier trimestre a été supérieure aux attentes en Europe et aux Etats-Unis. De manière générale le secteur financier a affiché de bonnes performances, tandis que certains secteurs cycliques comme l’énergie et la consommation discrétionnaire se sont avérés en-dessous des attentes. Les résultats des entreprises technologiques américaines sont restés solides. Les commentaires des sociétés ont mis généralement en évidence les inquiétudes liées aux tarifs douaniers.

Dans ce contexte, au 9 juin, les marchés développés progressent depuis le début de l’année de +6,49 % selon l’indice actions monde MSCI World (en dollar). L’indice large des actions américaines S&P500 affiche une performance de +2,72 % (en dollar), celui des actions de la zone euro, l'Euro Stoxx 50 de +12,82 % (en euro) et celui des actions japonaises TOPIX de +1,05 % (en yen). La performance des marchés émergents reflétée par l’indice MSCI Emerging Markets est quant à elle de +12,24 % (en dollar) depuis le début d’année.

 

Notre gestion :

Au cours du mois, nous avons maintenu une vue constructive en conservant à ce stade, une surpondération actions mesurée et une préférence marquée pour les actions européennes par rapport aux actions américaines. Au niveau sectoriel, nous avons augmenté notre sous pondération sur le secteur de l’énergie mais nous avons surtout effectué de nombreux arbitrages intra-sectoriels dans l’automobile, l’agroalimentaire, les services aux collectivités et les valeurs financières. Nous avons aussi pris quelques bénéfices sur les valeurs de la défense pour renforcer des idées de conviction dans l’industrie ou les médias.

 

L’Indice PMI pour Purchasing Managers Index, est un terme générique pour désigner des indices établis à partir d’enquêtes mensuelles auprès des directeurs d’achat des grandes entreprises des principales économies mondiales. Le PMI composite combine les données des indices PMI manufacturier et des services.

Publié chaque mois par l'organisme américain "Institute for Supply Management, l'indice ISM est séparé en deux grandes familles : L'ISM manufacturier, qui reflète la santé du secteur aux USA et l'ISM services, plus spécifique aux activités tertiaires. Cet indice, évalué en pourcentage, résulte d'une enquête auprès de 400 entreprises portant sur des données telles que : indicateurs sur les nouvelles commandes, production, emploi, délais de livraison, prix, stock, commandes à l’export et l’import, etc. On considère qu’une valeur supérieure à 50 % indique une expansion par rapport au mois précédent, si l’indice est inférieur à 50 %, cela indiquera alors une contraction.

Le Federal Open Market Committee (FOMC) est le comité de politique monétaire de la Réserve Fédérale des Etats-Unis. Il détermine notamment l’évolution du taux directeur de la FED.

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Document

 

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