Le point sur les marchés financiers juin 2022

Vendredi 10 juin 2022

Marchés Financiers

Au mois de mai, les investisseurs ont de nouveau les yeux rivés sur le niveau très élevé de l’inflation et les anticipations de resserrement monétaire des banques centrales qui s’annoncent de plus en plus rapides. Du côté géopolitique, le conflit en Ukraine et ses répercutions continuent d’impacter l’économie.

Zone Euro :

En Europe, la confiance des consommateurs se détériore en raison de l'intensification des pressions inflationnistes. Sur le plan géopolitique, le conflit en Ukraine s’enlise et le blocage des exportations de ressources alimentaires ukrainiennes par la Russie vient perturber le commerce mondial. Du côté de l’énergie, l’Union Européenne s’est accordée sur un embargo progressif de 90% des importations de pétrole russe d’ici la fin de l’année. Au même moment, l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole a annoncé l’augmentation de sa production de barils de 650 000 barils de plus par jour pour l’été, ce qui risque toutefois d’être insuffisant en raison de la vigueur de la demande. L'inflation a par conséquent de nouveau accéléré en mai, atteignant un nouveau record historique à 8,1 % (vs 7.5% en avril) sur 12 mois. Notons que le niveau de l’inflation sous-jacente – c’est-à-dire hors composantes énergétiques et alimentaires – sur 12 mois s’établit à 3,8% contre 3.5% en avril, ce qui montre la diffusion à toutes les composantes.

Malgré une légère baisse des indices de directeurs d’achat (PMI) manufacturier, service et composite à 54.4(vs 55.5 en avril), 56.3 (vs 57.7 en avril) et 54.9 (vs 55.8 en avril), l’activité reste toutefois soutenue.

Malgré une légère baisse des indices de directeurs d’achat (PMI) manufacturier, service et composite à 54.4(vs 55.5 en avril), 56.3 (vs 57.7 en avril) et 54.9 (vs 55.8 en avril), l’activité reste toutefois soutenue.

Etats-Unis :

Aux Etats-Unis, l'indice des prix à la consommation a augmenté de 8,3 % en glissement annuel et les pressions haussières concernent presque tous les secteurs, la diffusion s’opérant progressivement des biens aux services. Ce niveau d’inflation impacte à la baisse la confiance des consommateurs, réduit les revenus réels des ménages et pénalise la consommation discrétionnaire, en particulier des foyers disposant des plus bas revenus. La publication des chiffres du marché du travail continue d’envoyer un signal favorable quant à la tenue de la croissance aux Etats-Unis, et maintient donc la nécessité pour la FED de poursuivre son resserrement monétaire.

Tout comme en zone Euro, du côté des entreprises, les enquêtes PMI composites flash montrent une légère détérioration. La dynamique de l'activité tend à s’affaiblir dans l’industrie comme dans les services, mais reste à un niveau élevé.

Chine :

En Chine, les autorités ont annoncé la levée des restrictions sanitaires dans les régions où le nombre de cas COVID est sous contrôle. Cette décision envoie un signal positif pour l’économie.  Les indices des directeurs d’achat (PMI officiels) chinois connaissent une nette hausse en mai dans les secteurs manufacturiers comme dans les services. L’indice PMI composite atteint 48,4 en mai, en forte hausse par rapport au mois d’avril (42,7) mais reste néanmoins en territoire de contraction. L’indice PMI manufacturier affiche 49.6 en mai, un niveau proche de l’équilibre (vs 47,4 en avril) et l’indice PMI secteur non-manufacturier atteint 47,8 (vs 41,9 en avril). De plus, les pouvoirs publics continuent d’engager des mesures de soutien à l’activité, la PBoC a ainsi aussi réduit ses taux planchers et de référence des prêts bancaires (dit « LPR ») de à 0,20% et0,15%.

RETOUR SUR LES PRINCIPALES CLASSES D’ACTIFS

Banques Centrales :

Les banques centrales continuent de marteler leur message en vue d’un resserrement monétaire rapide afin d’endiguer l’inflation. Aux Etats-Unis, la vice-présidente de la FED a repoussé l’idée d’une pause dans la hausse des taux directeurs durant l’été considérant que l’inflation est encore nettement trop forte. Du côté de la BCE, avec des prévisions d’inflation nettement révisées à la hausse (encore +2,3% d’inflation sous-jacente attendue par la BCE en 2024), C. Lagarde a annoncé mettre fin aux rachats nets d’actifs à partir du 1 er juillet et pré-annoncé une remontée des trois taux directeurs dans les mois à venir, dont le taux de rémunération des dépôts pour +0,25% à la prochaine réunion du 21 juillet  et une possible hausse de 0,50% en septembre. C’est donc la fin du rendement monétaire négatif envisagé dès la fin de cette année qui est ainsi confirmé. Cette décision marque un tournant dans la politique de la BCE.  Il s'agira de la première hausse de taux depuis mai 2011.

Taux :

Les annonces de la BCE ont provoqué un mouvement à la hausse des taux des obligations souveraines. Ainsi, le rendement allemand à 10 ans (« Bund ») a atteint 1,45%, tandis que le rendement 10 ans français a franchi les 2%, un seuil pas atteint depuis 2014. Rappelons que le rendement du Bund s’établissait en territoire négatif en début d’année !

En plus de la hausse additionnelle marquée des taux souverains à 10 ans européens, nettement plus forte qu’aux Etats-Unis (+0,02% pour le T-Note américain, à 3,04%), ce sont surtout les spreads souverains entre l’Allemagne et les pays périphériques qui retiennent l’attention ce jour (+0,15% à 2,17% de surcroît de rendement pour l’Italie par rapport à l’Allemagne), alors que ni le communiqué ni la communication durant la conférence n’ont apporté suffisamment de détails quant aux mécanismes envisagés par la BCE pour rassurer les investisseurs sur ce risque de fragmentation des conditions financières en zone euro.

L’évolution des marchés obligataires pourrait encore rester sous pression en zone euro tant que l’inflation ne montrera pas de signaux de stabilisation, voire de baisse rapide et que les banques centrales n’auront pas fait leur preuve en remontant suffisamment leurs taux directeurs. La très grande incertitude environnante appelle à la prudence en raison de la fragilité de la situation, nous maintenons dans nos portefeuilles une sensibilité au taux d’intérêt inférieure à celle des indices de référence et restons très sélectifs dans nos investissements sur les obligations privées.

En dehors de la zone euro, au titre de diversification, nous sommes désormais positifs sur la dette émergente en devise forte, considérant que le niveau de portage est désormais attractif et que la composition géographique de la classe d’actif intègre plusieurs zones positivement sensibles à la hausse des prix des matières premières (certains pays d’Amérique Latine par exemple).

Actions :

L’ensemble des marchés reste en repli depuis le début de l’année face à l’incertitude sur la trajectoire à venir de l’inflation et compte tenu des politiques de resserrement monétaire des banques centrales. Ce contexte interroge sur le potentiel ralentissement de l’activité économique via le canal de la confiance, et l’impact sur les chiffres d’affaires, les marges, et donc les résultats des entreprises pour les prochains trimestres.

On notera l’exception du marché des actions des grandes capitalisations britanniques qui bénéficie d’une composition sectorielle plus concentrée sur l’énergie, les matières premières et la santé.  Les secteurs liés à l’énergie et aux matières premières restant bien sûr en haut du classement.

Sur le mois écoulé, le sentiment de marché s’est amélioré et les indices actions1 ont rebondi de l’ordre de 5% aux Etats unis et en Europe, et de plus de 8% sur les émergents2, soutenus par le rebond des actions chinoises, qui bénéficient au moins temporairement de la levée des restrictions sanitaires et de mesures de soutien monétaire et budgétaire, ces dernières restant toutefois très mesurées. La rotation sectorielle est toujours en faveur du style Value (actions les plus décotées), au détriment des valeurs de Croissance qui souffrent plus de la hausse des taux.

Du côté des entreprises, la saison de publications du 1er trimestre s’est terminée sans révision à la baisse des perspectives de croissance, à la fois en Europe et aux Etats-Unis. En revanche, depuis quelques semaines, nous assistons à des « avertissements » du côté de certaines entreprises américaines du secteur de la distribution. En effet, elles sont confrontées à deux grandes difficultés : l’envolée des coûts des intrants et des inquiétudes sur leur capacité à écouler les stocks auprès d’un consommateur américain qui subit la forte hausse des prix.

Dans ce contexte, nous restons prudents avec une préférence pour les secteurs défensifs, les valeurs décotées ou celles qui résistent mieux au contexte inflationniste. Au niveau géographique, nous favorisons les actions américaines qui devraient bénéficier d’un cycle économique plus résilient comparé à la zone euro ainsi que des premiers signes – mêmes timides – d’inflexion sur les pressions inflationnistes. Sur les dernières semaines, nous avons introduit une diversification sur les actions chinoises qui pourraient bénéficier à moyen terme de moindres confinements et de la poursuite d’une relance monétaire et budgétaire, ce qui favoriserait le rebond de l’activité.

1 Période 12/05 au 08/06

2 Indices MSCI USA, MSC Emergent en dollar, MSCI EMU en Eur